L’urgence écologique et sociale est au cœur du projet de société de l’Union Communiste Libertaire. Le capitalisme repose sur la nécessité d’une croissance continue de la production et sur une extension infinie de son emprise. Il surexploite les ressources planétaires. Les classes dominantes prétendent être capable de résoudre la crise environnementale par la technologie, sans sortir du capitalisme. Elles combattront toute mesure, même indispensable, qui menacerait leurs profits. Elles défendent un capitalisme prétendument «vert» qui promeut des solutions partielles exclusivement techniques, ouvrant de nouveaux marchés sans remettre en question la tendance mortifère à l’accumulation sans fin du capital.
Un anticapitalisme de luttes
Quelle réalité se cache derrière le mot capitalisme ? Un système qui permet l’exploitation de milliards d’êtres humains sur la planète, avec le soutien actif des États et des lois. Ce ne sont donc pas simplement les multinationales, qui ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Toutes les entreprises y participent. Elles profitent du fait qu’on doit travailler pour payer les factures, factures que ces mêmes entreprises nous font payer. La boucle est bouclée. La concurrence généralisée dans l’ère capitaliste a des conséquences écologiques lourdes : surexploitation des ressources, dérèglement climatique, pollution, etc. Le lien entre la lutte contre ce système et celle pour un avenir écologique est donc clair. C’est pourquoi nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre que le système s’effondre, ni de demander gentiment aux capitalistes d’arrêter la destruction de la planète. Nous devrons leur imposer, par des luttes anticapitalistes massives.
Trois révolutions nécessaires
Une révolution des modes de production avec leur maîtrise par les paysans et paysannes sera le fer de lance du combat contre les multinationales agroalimentaires. Une révolution des modes de vie pour une société égalitaire dans laquelle les moyens de production seront socialisés. L’organisation des villes, les équilibres entre villes et ruralité, l’organisation de nouveaux habitats –favorisant la mutualisation de biens et d’installations– socialement utiles et débarrassés des productions inutiles. Une vie sociale riche, associant convivialité, culture, sciences, activités physiques, festives… pourra éclore et la possession de biens matériels n’aura plus une place centrale dans la vie humaine. Une société où l’être humain ne dominera plus la nature mais y intégrera ses activités afin de vivre en harmonie avec le reste du monde vivant. Une révolution des échanges, contre le libre-échange, pour défendre l’«autonomie productive». Chaque région du monde doit être en mesure de produire ce dont elle a besoin une fois débarrassée de la dépendance aux capitalistes. Sans être en autarcie, mais en privilégiant les circuits d’échange courts, et la limitation des échanges longs à ce qui ne peut être produit localement.
Un anticapitalisme antiraciste
Les premier·ères touché·es par les inégalités et catastrophes environnementales sont les personnes racisées et les précaires. Ces inégalités, perpétrés intentionnellement par les États impérialistes, sont observables à l’échelle du globe comme à l’échelle d’un pays voir même d’une ville. Si nous voulons lutter contre le capitalisme et ses effets désastreux sur l’environnement, il faut prendre en compte et impliquer les personnes directement concernées par ces impacts.
Un anticapitalisme libertaire
Pour nous libertaires, les luttes doivent être autogérées : ce sont celles et ceux qui luttent qui doivent décider ensemble quand et comment agir, et ne jamais se résoudre à laisser une poignée de gens diriger les luttes. Notre objectif est de vivre dans une société écologique et débarrassée des oppression. Elle ne pourrait être qu’autogestionnaire : les objectifs de l’économie (qui produit quoi et comment ?) doivent être décidés collectivement, et non pas par d’obscurs entrepreneurs ou par l’État. Être libertaire (ou anarchiste), c’est considérer que chacun·e a la capacité de participer aux décisions et de travailler à l’intérêt général, et lutter pour construire ce projet de société, débarrassé du diktat des entreprises privées capitalistes et de l’exploitation qui va avec.
Colonialisme français et scandale du Chlodécone
Prenons l’exemple des Antilles, avec le Chlordécone, un pesticide éliminant les parasites des bananiers, la monoculture principale de la Martinique et 3e en Guadeloupe. Utilisé depuis 1972, son interdiction a été prononcée en 1990 bien que sa toxicité était connue depuis 1976. Malgré ça, son utilisation a continué encore 3 ans, sous la pression des lobbys de producteurs de bananeraies. La complaisance du gouvernement a conduit à une situation environnementale et sanitaire catastrophique. Aujourd’hui, 93% de la population des îles est empoisonnée. La Martinique et la Guadeloupe détiennent le triste record des régions avec les plus hauts taux de cancer de la prostate au monde. Les cours d’eau, les nappes phréatiques et les terres agricoles sont empoisonnées pour au moins 7 siècles. En 2006, une plainte est déposée contre l’État français par 7 associations antillaises contre l’empoisonnement des îles. Depuis, l’État et la justice française font tout pour que le procès n’ait pas lieu, notamment en faisant disparaître des preuves. Si les pesticides sont nombreux à avoir durablement altéré la santé des ouvrier·ères agricoles, le Chlordécone est un symbole du désastre écologique résultant de la politique coloniale française. L’enjeu, en plus d’obtenir justice, est de se débarrasser de l’emprise d’une bourgeoisie qui descend directement des colons français (les Békés). Ces personnes, essentiellement blanches, représentent moins de 1% de la population et possèdent plus de 50% des terres sur l’île et plus de 90% du commerce agroalimentaire. Il est urgent que des mesures concrètes soient prises pour dépolluer les sols et les cours d’eau, décontaminer les populations et leur alimentation, indemniser les victimes et prendre en charge leurs frais médicaux. La culture des terres doit se faire par et pour les populations locales, dans le respect de leur santé, et dans le but de préserver également la faune et la flore.
Dioxine – l’agent orange qu’est ce que c’est ?
Il s’agit d’un herbicide, utilisé par les États Unis d’Amérique pendant la guerre du Vietnam. Près de 44 millions de litre d’agent orange-dioxine ont été lâchés sur les forêts où se cachait les résistant·es vienamien·nes et où vivaient également de nombreux·ses civil·es. Ce produit toxique est à l’origine de nombreuses maladies et malformations, qui ont touché non seulement les personnes directement exposées pendant la guerre, mais aussi leurs enfants et petits enfants. Entre 2,1 et 4,8 millions de vietnamien·nes en ont été victimes. Tran To Nga, ancienne combattante elle-même contaminée par l’agent orange, a décidé de se lancer dans une procédure au civil en poursuivant 14 firmes parmi lesquelles Monsanto et Dow Chemical, qui ont produit de l’agent orange pour l’armée des États-Unis d’Amérique. Tran To Nga a pu porter plainte dès 2014 -grâce à un changement de loi de 2013- mais depuis cette date, le procès n’a cessé d’être reporté. L’audience qui a enfin eu lieu le 25 janvier faisait suite à six années de procédures écrites. Jusqu’à présent, ces firmes n’ont jamais été condamnées. Des associations de victimes vietnamiennes ont porté plainte aux États-Unis d’Amérique mais la justice étatsunienne a toujours donné gain de cause aux firmes capitalistes. Pour ces dernières, seul le gouvernement étatsunien peut être tenu pour responsable, car elles étaient tenues de participer à l’effort de guerre sous peine de sanction. Elles contestent également le lien entre l’agent orange et les maladies dont souffrent de nombreux·ses vietnamien·nes. Tran To Nga et ses avocats estiment que les 14 multinationales ont une forte responsabilité, notamment en n’ayant pas informé les autorités étatsuniennes de la véritable toxicité de l’agent orange. Une victoire de Tran To Nga ouvrirait la voie d’une indemnisation pour d’autres victimes, et représenterait une avancée historique. Le jugement est mis en délibéré pour le 10 mai.
Union communiste libertaire Toulouse et alentours le 9 mai 2021