En matière de lutte contre le patriarcat, la mairie de Toulouse se contente de faire de la communication. Les mesures concrètes face à la flambée des agressions et violences patriarcales dans la ville ne semblent pas les intéresser au delà de quelques affiches dans le métro et de grands discours vides et sans conséquences. L’Union communiste libertaire Toulouse et alentours souhaite dénoncer les injustices flagrantes que vivent les femmes et minorités de genre et proposer des mesures concrètes de lutte contre les violences patriarcales dans une perspective libertaires.
Attention, dans la suite de ce texte, nous aborderons des sujets susceptibles de toucher certaines personnes comme les agressions sexistes et sexuelles. Nous utiliserons également le terme de sexisé·e, englobant toutes les minorités de genre qui, en plus des femmes, sont exploité·es par le patriarcat.
Le féminisme de classe version Moudenc, c’est la start’up nation
À l’occasion de la journée internationale de lutte pour le droit des femmes et minorités de genre, la mairie a placardé des portraits de femmes pour commémorer leur place dans la société. Les figures du féminisme de classe version Moudenc sont presque toutes issues du même milieu que lui : la classe moyenne… plutôt supérieure.
Pour la mairie, l’émancipation des personnes sexisées passe par les hautes études et la direction d’entreprise. Les dernières de cordées qui risquent leur vie au quotidien durant cette pandémie sont absentes du coup de com’. Les infirmières et aide-soignantes, caissières et employées d’entretien, agentes d’accueil et assistantes maternelles, et toutes les autres prolétaires n’ont visiblement qu’une place marginale.
Bien sûr, contrairement aux cheffes d’entreprises, aucune syndicaliste n’est à l’honneur ! La stratégie de com’ est bien rodée. La mairie fait la promotion de femmes qui sont bien placées dans l’appareil de production capitaliste, appelant les autres à s’en inspirer. À l’injustice de la condition faite aux personnes subissant le patriarcat, est ajoutée l’insulte de tenter de faire croire qu’elles peuvent s’en sortir de par leur « mérite ». Se faisant, ce coup de com’, qui est en fait de la propagande servant les intérêts de la bourgeoisie locale, invisibilise toujours plus les personnes sexisées de notre classe sociale. Pourtant, ce sont bien ces prolétaires que les toulousain·es ont applaudi chaque soir à 19h durant le premier confinement.
Nos propositions contre le patriarcat
Contre les violences sexistes et sexuelles
Moudenc se targue de la création prochaine de 100 postes supplémentaires dans sa police. Loin d’être une alliée dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, cette dernière est la représentante d’une autorité arbitraire, violente et patriarcale. A la place, il aurait fallu engager des éducateur·rices et médiateur·rices, sensibilisé·es aux violences sexistes et sexuelles. Ils et elles auraient permis d’accueillir la parole des victimes sans la remettre en doute et en leur proposant un accompagnement adapté.
Nous voulons mettre en place une justice restauratrice et transformative. Qui se concentre sur le soin des victimes et s’attaque aux causes de la violence. Qui traite les agresseurs en fonction des conséquences de leurs actes et non de leur classe ou de leur couleur de peau. Pour y parvenir l’une des premières étapes serait de former l’ensemble du personnel municipal à recueillir la parole de victimes pour pouvoir réaliser des procédures de signalement en cas de violences sexuelles et ainsi protéger les victimes.
La stratégie répressive de la justice bourgeoise qui ne sait que remplir les prisons n’a jamais été efficace pour lutter contre les violences du patriarcat. Notre approche radicale de la justice transformative s’attaque à la racine du problème, l’éducation au consentement et l’accompagnement des victimes pour les aider à faire face à ce traumatisme.
Pour en finir avec les stéréotypes de genre
Afin de permettre aux personnes sexisé·es de se réapproprier la rue, les noms des rues doivent être modifiées. Aujourd’hui, seulement 174 rues portent des noms de femmes contre 3476 pour des noms d’hommes. Les rues à renommer ne manquent pas : celles données à des colonisateurs (rue Colbert qui est à l’initiative du Code Noir), à des faux héros de guerre (rue du Général d’Hamade, à l’initiative des goums marocains, rue du Général Pellet ayant mené à la mort de 15 à 20 000 indépendantistes malgaches luttant pour l’indépendance de Magadascar) ou encore aux assassins du prolétariat (rue Adolphe Thiers bourreau sanguinaire de la Commune de Paris) doivent être remplacées par des noms de personnes sexisé·es.
L’hypersexualisation des corps féminins, la culture du viol, l’injonction à la beauté selon les normes décidées par les publicitaires (minces, valides, blanc·hes), l’injonction à la jeunesse, l’usage de tout stéréotype, doivent disparaitre des panneaux municipaux. La place laissée à la publicité en ville, et sur le mobilier urbain en particulier doit être questionnée. Pourquoi est-il plus facile de lire une pub plutôt que les horaires des bus sur un abribus ?
Le bâti scolaire et les CLAE sont une responsabilité municipale. Or aucune réflexion globale n’est engagée sur la forme des cours de récréation, la nature des activités éducatives et des jeux pour éviter reproduire les stéréotypes de genre et permettre aux enfants de jouer ensemble en mixité.
Pour que l’éducation ne soit plus seulement une affaire de femme
Les crèches municipales sont trop peu nombreuses et les délais sont interminables pour obtenir une place. Les plus précaires sont souvent privé·es de ce service public obligeant un des parents à s’occuper des jeunes enfants faute de pouvoir se payer une place dans un établissement privé. En la matière, ce sont les femmes qui majoritairement vont devoir sacrifier leur vie professionnelle.
La mairie méprise ses agent·es au point d’avoir décidé d’appliquer la loi dite Dussopt leur supprimant 10 jours de congés payés et 4 jours d’ancienneté. À l’échelle de Toulouse, c’est l’équivalent de 600 postes qui ne seront pas créés. Conséquence : moins de personnel dans les écoles et les crèches alors que la situation est déjà intenable. C’est une attaque directe aux conditions de travail des salarié·es, mais aussi aux personnes sexisées qui ont besoin de nombreuses places en crèches pour pouvoir s’autonomiser. L’intersyndicale CGT-FSU-SUD est en lutte sur ces question, soutenons-les !
Pour rendre l’espace publique accessible à toutes
Entre 30 à 40 % de femmes SDF, seraient sans logement sur Toulouse. La précarité du logement et le manque de perspectives sociales en font des victimes de l’environnement viriliste qui les entourent. De nombreuses femmes racisées, notamment Rroms et réfugiées syriennes, sont contraintes de faire la manche avec leurs enfants, mettant ces derniers en danger. Les mesures d’accompagnement et d’écoute municipale qui relèvent également de la compétence du Conseil Général, sont quasiment inexistantes.
Les foyers d’accueil pour femmes isolées et les structures d’accompagnement social sont incapables d’accueillir et de comprendre les situations individuelles ou familiales de ces femmes. Quelques associations insuffisamment soutenues par les pouvoirs publics se battent au quotidien dans cette jungle viriliste. Le rôle d’une municipalité devrait être de proposer des espaces non mixtes d’écoute et d’accompagner les personnes victimes de violences pour les loger et subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Le bâtiments vides ne manquent pas.
Les travailleur·euses du sexe connaissent aussi une précarité de vie et sociale. La police les pourchasse sur ordre de la mairie et de la préfecture pour que l’entre soi embourgeoisé n’ait pas à les croiser dans les quartiers. Cet acharnement sur des populations déjà en grande précarité s’est confirmé depuis la crise du COVID puisque la mairie en a profité pour renforcer ou étendre ses arrêtés anti-prostitution. Les associations de personnes concernées dénoncent ces agissements et nous soutenons leurs actions. Une mairie à l’écoute des plus précaires prendrait en compte ces revendications pour les protéger et leur proposer des solutions pour que ces personnes puissent s’extraire, si elles le souhaitent, de cette exploitation du capitalisme informel ou qu’au moins elles couvrent leurs besoins essentiels en matière de santé et de prévention des risques.
Notre projet municipaliste libertaire
Nous ne sommes pas électoraliste et les propositions que nous faisons dans ce texte ne constituent pas un programme pour une hypothétique prise de pouvoir par les urnes. Notre objectif est de mettre en place un contre-pouvoir autogéré par et pour les prolétaires. Les propositions que nous faisons devront évidemment être débattues, adaptées et modifiées en fonction de leur pertinence et des besoins qu’identifiera la commune autogérée de Toulouse.
Notre projet ne sera donc jamais figé. L’UCL T&A en tant que telle ne fait aucune promesse : notre émancipation collective dépasse largement son cadre et sera l’oeuvre de tous et de toutes. Toutes et tous ensemble mettons en place ce contre-pouvoir dès maintenant pour aller vers une gestion égalitaire de nos vies et nos villes !
Vive le municipalisme libertaire et à bas le patriarcat !
Union communiste libertaire Toulouse et alentours le 8 avril 2021